C'est le moment pour (ré)écouter ses disques !
« De la musique avant toute chose » disait Paul Verlaine. Et ça, c’est en temps normal ! En période de confinement, la musique c’est un peu tout ce qui nous reste. Elle permet de s’évader, de voler au dessus du confinement comme Margot vole au dessus des rageux dans la matinale de Talri. Alors on s’est dit que c’était la période idéale pour ressortir nos anciens disques, ceux qu’on aime plus que tout mais qu’on laisse de coté. On a tous ce genre de disques, ceux qui sont rayés parce qu’on les a trop écoutés et mal rangés, ceux qu’on appelle nos « classiques » !
Donc j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai ré-ouvert mon vieux bac à disques. Sous la poussière, j’ai retrouvé plusieurs pépites dont il faut absolument parler ! La première, c’est « L’école du micro d’argent », du groupe mythique IAM.
Avec ce disque, le groupe IAM s’est imposé comme l’un des piliers du rap francophone. Ils ont défini une thématique sombre, guerrière et ils sont allé enregistrer tout ça à New-York, la Mecque de l’époque pour tous les fans de rap. Une fois revenus en France l’album est prêt mais quelque chose cloche : Il est trop « clean », trop propre pour la bande de marseillais qui décident de le ré-enregistrer à Paris. Virgin, leur maison de production de l’époque, est au bord de la crise de nerfs mais les marseillais savent ce qu’ils font : 16 titres, 10 sons bonus et des invités comme FABE ou les ‘ricains de Sunz Of Man.
Le succès est instantané : l’album deviendra disque d’or le soir de sa sortie dans les bacs, un jour de mars 1997. Et là, on parle de ventes physiques, pas de plate-forme de streaming ! À l’époque, une certification disque d’or représentais 100 000 ventes. L’album deviendra par la suite disque de diamant avec plus d’un million et demi d’exemplaires vendus à travers le monde. Il marque pour beaucoup de fans le début de ce qu’on appelle le « premier âge d’or du rap français ».
Mais qu’est-ce qui rend cet album exceptionnel ?
Déjà, son univers : Shurik’n et AKH ont imaginés un univers sombre que l’on explore au fur et à mesure que défilent les pistes. Les marseillais brandissent fièrement le micro d’argent et déclarent la guerre aux mauvais rappeurs, « ceux qui sont de l’école du micros en bois ». Au fur et à mesure de l’écoute, on alterne entre les morceaux hyper rythmés à la « Bouge la tête », et le « Story Telling » qui se faisait beaucoup à cette période comme avec le morceau « Elle donne con corps avant son nom ».
Niveau références, il y en a pour tous les goûts : le groupe a toujours été influencé par les vieux Westerns comme « Le Bon, la Brute et le Truand« de Sergio Leone ainsi que les films fantastiques comme « Stars Wars« dans le morceau « L’empire du coté obscur ». Toutes ces références fusionnent dans un cocktail d’ambiances sonores et de samples des dialogues mythiques issus de grands films. À l’écoute, on ferme les yeux et on se téléporte directement sur la « Planète Mars ».
Impossible de parler de cet album sans évoquer aussi la plume des deux rappeurs : Shurik’n et Akhenaton. Les textes sont efficaces et calibrés pour faire réfléchir. On ne parle pas ici de « rap conscient », mais plutôt de rap tout court ! Les thèmes sont crus, les images parfois violentes et chaque morceau correspond à une émotion précise. L’alchimie entre les deux MC est parfaite. Du coté des prods, DJ Kheops et DJ Immotep ont utilisés des pépites de la musique noir américaine comme par exemple l’excellent « Bills » du groupe de Soul/Funk « The counts » que l’on retrouve dans le sample du morceau « Chez le mac ». Et en plus, ils ont posés eux même des scratchs enflammés sur chaque pistes !
On est aussi gâté en featurings. Sur le titre « La Saga » IAM se paye le luxe de poser aux cotés de Sunz of Man de la Wutang Familly (ce groupe est composé de Killah Priest, 60 Second Assassin, Prodigal Sunn (le cousin de RZA) et Hell Razah). Ce feat d’anthologie a permit au groupe de s’ouvrir les portes du marché américain et anglais.
Coté français, on retrouve également le grand Fabe sur le titre « L’Enfer » et Daddy Nuttea qui donne de la voix sur le refrain du morceau « un cri court dans la nuit ».
L’album se termine en apothéose avec le morceau « Demain c’est loin ». Un titre de 9 minutes, qui transperce l’auditeur avec la force d’une balle de 9mm. IAM s’inscrit dans la légende avec ce titre qui marquera toutes les générations futures. La recette est simple : une boucle courte et efficace, deux complets écris à la lame de rasoir et surtout : pas de refrains ! Le résultat est un titre immortel que le groupe a joué partout sur le globe, jusqu’au pied des grandes pyramides d’Egypte. De l’art !
Alexandre MAHLER